Le 15 juin dernier, le hub créatif namurois TRAKK prêtait ses jolis murs, sa terrasse avec vue sur Meuse et son atrium à un talk co-orchestré par le KIKK, Wallonie-Bruxelles Design Mode (WBDM) et Wallonie Design. L’occasion de faire se rencontrer leurs publics respectifs autour d’une thématique large et rassembleuse, et de casser les codes souvent attachés aux métiers du design.

Directrice du Kikk Festival (l’un des membres fondateurs du TRAKK) et cheffe d’orchestre de l’évènement, Laura Latour rappelait, en début de soirée, l’importance de « faire se rencontrer et réseauter les acteurs des industries créatives ». Une opinion partagée par Laure Capitani qui soulignait quant à elle la volonté de WBDM d’amener toujours plus d’acteurs des industries créatives à croiser leurs compétences dans une vision à l’international. Cette soirée organisée en plusieurs temps a permis au public (architectes, designers, photographes, vidéastes, étudiants ou encore acteurs du service public) de profiter de l’expérience des designers invités, mais aussi d’échanger leurs impressions « al fresco » sur la terrasse du TRAKK en clôture de soirée.

5 invités sur le grill

Pour cette soirée de discussion et de networking aux vrais airs d’été, les invités avaient 15 minutes pour présenter leur projet. L’occasion pour le public de découvrir l’univers et le parcours d’AFC Collection. Augustin Bown, son co-fondateur, est revenu sur les 4 ans qui se sont écoulés depuis les prémisses du projet qu’il a imaginé et mis sur pied avec Audrey Joris. Classée dans la liste des « 30 Under 30 » par le magazine Forbes l’an dernier, AFC Collection est la preuve qu’on peut innover dans un secteur aussi conservateur que celui de l’architecture d’intérieur et de la distribution de mobilier. La force du concept, c’est évidemment son ancrage dans le digital et son approche très « millenials » de l’aménagement d’intérieur ; une approche qui mixe showroom physique, visualisation digitale et accompagnement humain.

Autre ambiance avec Studio Biskt, un duo formé par Charlotte Gigan, céramiste, et son compagnon et partenaire de travail Martin Duchêne, designer industriel. Créateurs du vase Tulumba, un produit identitaire distribué en boutiques et en ligne, ils ont développé une approche sans compromis, mélange d’artisanat et de procédés de fabrication industriels qui leur a permis de remporter le titre de Designer de l’Année 2022, mais aussi, par le biais de la galerie qui les représente, de se frotter au segment de plus en plus porteur du design de collection.

Passion créative

Quant à Joachim Froment, co-fondateur de l’agence de design et d’ingénierie FutureWave, il a évoqué quelques-uns des projets d’accompagnement qu’il orchestre avec son équipe pour des sociétés déjà bien implantées sur le marché (comme Delhaize ou Sony), mais aussi des start-ups émergentes. Un bel exemple de design génératif qui s’inscrit dans une approche hybride, aux frontières du design, de l’ingénierie et du business et qui entend offrir aux clients de l’agence des solutions innovantes sur le plan technologique tout en veillant à ancrer chaque projet dans une vraie logique de marché. Alors qu’il vise à créer à terme une équipe d’une trentaine de collaborateurs, le jeune chef d’entreprise a souligné l’importance de conserver, même dans une dynamique d’entreprise, une passion pour la création ; une passion essentielle pour pouvoir répondre pleinement à la mission de l’agence ; celle de faciliter la mise en œuvre de concepts ambitieux et l’éclosion de nouveaux talents créatifs.

Aventures humaines

Ces 3 profils que tout semble opposer présentent, au final, de nombreuses similitudes, dont une volonté de pousser des portes qui semblent fermées d’avance et de faire se croiser les genres. Sous la houlette de Laura Latour, la séance de questions-réponses, mi questionnaire de Proust, mi quizz ludique et rock ‘n’roll, a offert à ces conférenciers 2.0 l’occasion de jeter un œil dans le rétro et de revenir sur leurs premières amours, leur parcours et leurs ambitions futures. Un moment décomplexé et très improvisé, bien que riche en inspirations. L’occasion, entre autres, d’en savoir plus sur le profil atypique d’Augustin Bown, formé à la finance, un temps scénographe et qui mixe désormais son bagage académique et ses aspirations artistiques profondes ou de comprendre pourquoi Joachim Froment qui aime évoquer sa passion pour le dessin (« Je dessinais avant de marcher », raconte-t-il) , mais qui, jusque tard dans son cursus, « ignorait que le design existait » cherche aujourd’hui à faire grandir suffisamment son agence pour pouvoir se décharger de certaines tâches de management afin de renouer avec l’approche créative qui le fait vibrer.

La puissance de l’entreprenariat 2.0

Malgré les obstacles, mais aussi les nombreuses opportunités engendrées par la parenthèse COVID (une année d’introspection, de recherches en atelier, mais aussi de vente en ligne), le duo de studio Biskt soulignait quant à lui, son envie de rester ‘petit’. Une évidence quand on découvre le parcours de Charlotte Gigan, vouée à une carrière de comptable et pour qui le travail de la terre s’est avéré être une révélation. Le prix de Designer de l’Année reçu l’an dernier l’a confortée dans l’idée que la vocation de leur studio était de mélanger les genres et de ‘ne surtout pas se laisser enfermer dans une case’. Au cours de cet échange ponctué de nombreux fous-rire, les 5 invités de la soirée ont offert aux participants une jolie leçon d’entreprenariat. Comme le soulignait Martin Duchêne en guise de conclusion,

Si je devais donner un conseil à celui que j’étais il y 10 ans, je lui dirais : N’écoute pas trop ce qu’on te dit. Tu vas galérer, mais ça va aller.