Giovanna Massoni : le dialogue est essentiel

Giovanna Massoni :
le dialogue est essentiel

Categorie: Interviews
Date de publication:
©Serge Anton

Née à Milan, cette curatrice, consultante et commissaire d’expos, active dans les domaines du design et des arts plastiques vit à Bruxelles depuis plus de 20 ans. Collaboratrice régulière de WBDM, elle porte un regard éclairé sur un secteur en plein questionnement.

©Germain Oze
Vous dites que le design doit être le témoin de notre époque. C’est d’autant plus vrai aujourd’hui.

La crise que nous traversons nous oblige à envisager le métier de designer de manière plus humble. Plutôt que de donner au designer la mission de « sauver le monde », il faut tendre vers une réflexion susceptible de créer un terrain fertile, propice à une discussion ouverte.

Au regard de la crise que nous traversons, vous plaidez pour une désindividualisation dans l’approche des réseaux sociaux. Expliquez-nous.

Lors du premier confinement, j’avais pointé du doigt une individualisation dans l’approche des réseaux sociaux utilisés dans une idée de : « moi, je peux ». Je pense qu’il est, au contraire, urgent d’utiliser la force du collectif pour amorcer des échanges constructifs. L’idée est d’engager une discussion entre les acteurs de différents secteurs pour préparer « l’après ». Dans la situation dramatique que nous vivons, un peu de silence est plus que bénéfique.

Vous évoquez aussi l’importance pour les designers de réfléchir à une autogestion de la crise.

C’est en effet le moment de concentrer nos efforts sur les concepts d’économie circulaire et de design social. Avant la crise, les questions relatives à l’assistance des personnes âgées avaient fait l’objet de discussions, mais sans plus. Que les crises soient climatiques ou sanitaires, la dynamique doit être la même : mettre en lumière des problèmes précis, puis plancher sur des réponses concrètes et innovantes.

C’est là qu’intervient la participation citoyenne dans le design, un autre de vos leitmotivs.

Il faut en effet sortir de la culture de glorification du designer. Plutôt que de faire la guerre au plastique comme c’est le cas depuis de nombreuses années, il me parait plus urgent de tendre vers une phase de dé-consommation en initiant un mode de pensée circulaire qui nous concerne tous en tant qu’individus.

©Marc Wendelski
Ce design interconnecté dont vous parlez, se libère de l’obligation de créer de nouveaux objets.

Quand on veut faire bouger les choses, c’est toute la filière qu’il faut réinventer. Se libérer de la vision idéalisée d’un design qui se résume à offrir aux consommateurs la maison de leur rêve prend du temps. Dans la même logique, on ne peut pas, même s’ils perdent en légitimité, renoncer du jour au lendemain aux foires et aux salons qui constituent un pilier essentiel de notre économie.

L’industrie joue-t-elle aussi un rôle dans ce processus de changement ?

Pendant longtemps, on a incité les jeunes designers à multiplier les prototypes. Or, on sait que, 10 ans après leur conception, beaucoup de ces projets sont encore dans les cartons. La production de nouveaux biens de consommation ne peut pas contribuer à l’élévation de notre mode de pensée. La bonne nouvelle, c’est que le monde de l’industrie se pose les mêmes questions. S’agit-il d’une volonté sincère ou juste d’un bluff marketing ? Même si on consent de réels efforts en termes de réemploi, ce sera toujours la grande industrie qui fera la différence. Les « petits gestes pour la planète » dont on parlait il y a 20 ans ont fait évoluer les consciences, mais ce qui manque aujourd’hui, ce sont des positions claires tant du côté des industriels que des pouvoirs politiques.

'La Belgique des Autres' - Biennale Saint-Etienne 2008
Et en Belgique on en est-où ?

Les designers belges sont connus pour leur esprit d’ouverture. De par leur portée internationale, des organismes de soutien à la création comme WBDM sont des moteurs d’ouverture. Il est intéressant d’observer comment une si petite nation a eu l’intelligence, dès 2006, de favoriser l’émergence d’une création belge au travers d’institutions comme WBDM et d’initiatives comme Belgium is Design. C’est d’autant plus frappant que des pays comme l’Italie, qu’on considère comme des plaques tournantes du design, n’ont créé aucune structure de ce type.

Comment concilier réflexion écologique et promotion du design belge à l’étranger ?

Comme le rappelait régulièrement Philippe Suinen, ex-directeur de l’Awex, ce qui fait la force de la Belgique, ce sont ses talents. C’est eux, leurs stratégies et leurs visions, que nous devons exporter. Notre force, c’est notre diversité. Aujourd’hui, pour proposer des alternatives, il faut favoriser les échanges au niveau des designers, de l’industrie, des écoles et des universités.

Interview par

Marie Honnay

En collaboration avec

WBDM s’associe à TLmagazine pour promouvoir et diffuser la créativité et le talent belges à l’international. Pour découvrir plus d’articles sur la créativité belge, rendez-vous sur TL Magazine.

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