Diplômé de la Design Academy Eindhoven en 2008 et lauréat de plusieurs prix et récompenses, le designer basé à Bruxelles a toujours tracé sa route librement, sans se mettre de barrière en termes de style et d’approche. Il nous a livré sa vision d’un métier exigent qu’il pratique avec passion et engagement.

Maarten, vous venez d’être élu Designer of the Year 2025. Une belle reconnaissance. Si vous deviez résumer votre démarche actuelle, comment décririez-vous la ligne directrice de votre travail ?
Je dirais qu’il n’a pas changé depuis la création de mon studio. Je m’applique à faire cohabiter les projets personnels que je vends par le bais de galeries et un travail plus industriel à destination des éditeurs et des fabricants. Pour moi, ces deux aspects ne s’opposent pas, au contraire. Dernièrement, je me suis installé dans un nouveau studio qui me permet de fabriquer des objets plus grands. J’éprouve de plus en plus de plaisir à concevoir un objet de A à Z sans intervention extérieure. L’avantage du design industriel, c’est qu’il permet, quant à lui, de proposer des produits à des prix plus accessibles, un aspect du métier que je considère comme très important.

Vous êtes souvent associé au collectible design. Que représente cette notion pour vous ?
Je ne considère pas le design industriel comme nécessairement moins durable. Tout dépend des matériaux et du processus de fabrication qu’il implique. Ce qui m’intéresse dans le design de collection, c’est le caractère unique de l’objet ; le fait qu’il soit fabriqué à la main par le biais d’un processus parfois long et ardu. J’aime aussi la liberté que cette approche implique. Quand je fabrique un objet, je ne fais aucun compromis. Ma vision prime sur tout le reste.

Cette vision du design influence-t-elle vos choix de matériaux ou vos collaborations avec les artisans ?
A mon sens, chaque projet appelle un nouveau choix de matériaux et de techniques. C’est d’ailleurs le moment que je préfère ; celui où je peux m’approprier un matériau. C’est comme un nouveau monde qui s’ouvre à moi. Parfois, je me forme moi-même. D’autres fois, je me tourne vers des artisans qui maitrisent cette technique bien mieux que moi. Au début de ma carrière, j’étais dans une démarche d’observation. Si on prend l’exemple des Suitcase series (le projet de fin d’études qui l’a propulsé sur le devant de la scène, ndlr.), j’ai profité de l’expérience d’un artisan maroquinier. Jamais je n’aurais pu acquérir facilement un tel savoir-faire. Plus tard, quand j’ai travaillé les vitraux, je me suis tourné vers un expert belge en la matière. Pour mon dernier projet en date – Cairn Light -, je n’ai trouvé personne qui puisse m’apprendre à sculpter la pierre. J’ai donc rejoint un cours de sculpture à l’académie d’Anderlecht. Puis, je me suis acheté quelques outils et j’ai démarré.

Cairn Light est une collection qui intrigue : en rupture avec notre monde ultra-connecté, elle évoque la mémoire, voire une forme de spiritualité. C’était votre intention ?
Je ne me contente jamais de dessiner de jolis objets. Ce qui m’importe, c’est de raconter une histoire belle et authentique. Pour ce projet, je me suis inspiré des amas de pierres (ou tumulus) : les récents, élevés par les randonneurs, qu’on trouve notamment sur les abords des routes, mais aussi ceux qui datent de la Préhistoire. Ces monticules sont tellement chargés émotionnellement que j’ai voulus conserver leur pureté en ne les sculptant que de l’intérieur. L’extérieur reste brut, à l’état naturel.

A travers les Suitcase series, vous avez exploré le thème du voyage. Que vouliez-vous exprimer à travers cette métaphore du déplacement ?
Le voyage est propice à de nombreuses interprétations qui diffèrent forcément d’une personne à l’autre. J’ai cherché à transmettre une idée très romantique de la notion d’un voyage. Avec la série Mutation, l’idée était plutôt de créer l’illusion que mes objets n’avaient pas été fabriqués à la main (même si c’est le cas), mais qu’ils étaient le fruit d’une transformation organique.
WBDM vous a accompagné à différents moments de votre carrière. Quel rôle ce soutien a-t-il joué dans votre développement, que ce soit en termes de visibilité ou d’ouverture à l’international ?
C’est un soutien forcément inestimable qui m’a non seulement permis de concevoir des prototypes que je n’aurais pas pu développer sans une aide financière extérieure (bourses d’aide de la FWB), mais aussi de participer à des expositions et à des foires, à Milan notamment. En Belgique, nous avons l’immense chance de pouvoir nous appuyer sur des structures telles que celle-ci.

Quelques semaines après l’obtention de cette distinction, quel regard portez-vous sur l’avenir de votre studio ?
Je n’ai jamais réfléchi en termes de stratégie ou échafaudé des plans de carrière très précis. Même si le voyage n’a pas toujours été facile et que le fait de créer mon studio juste après ma sortie de l’école n’était pas un choix évident, je suis heureux du chemin parcouru. J’ai appris de mes erreurs et j’ai grandi en conservant le même enthousiasme et une réelle envie de saisir les opportunités qui se présentent à moi, à l’étranger, notamment.